La renommée n’est pas toujours un gage de qualité. Et, si Amélie Nothomb est devenue une aubaine sur le marché de l’édition, assurant ainsi la pérennité des affaires de son éditeur, il en est tout autrement d’un éventuel acquiescement de la littérature. Carrière en dents de scie, dirait-on. Après les magnifiques ‘Stupeur et tremblements’ ou ‘Métaphysique des tubes’, malheureusement, l’écrivain est également capable d’écrire ‘Acide sulfurique’, Robert des noms propres’ et aujourd’hui ‘Le Fait du prince’. Un constat : le Japon lui va mieux que la Suède. Peut-être aussi que sa production quasi-industrielle de romans y est pour quelque chose. Délaisser la plume pour le burin, ça n’est pas une mince affaire. Une atmosphère kafkaïenne, de l’originalité, une réflexion sur l’identité, paraît-il… et puis quoi encore. En réalité, l’histoire n’est pas subtilement absurde mais invraisemblable. Le style, contextualisé ou non, n’est pas original mais faussement ingénu ou maladroitement suffisant : "C’est quand on ne cherche plus les informations qu’on les trouve" ou "La villa, c’est l’idée que les âmes simples se font du luxe" ou encore "Il faut bien mourir quelque part". Et la fin, bâclée, pressée, arrive comme un cheveu sur la soupe : non pas inattendue mais déplacée. Lorsque la célérité s’associe au colmatage, Amélie déserte l’écriture littéraire pour investir une entreprise de maçonnerie.
Le talent implique une responsabilité, celle d’en être à la hauteur. Marc Lévy n’a jamais écrit de bons livres, on ne peut, dés lors, lui en vouloir d’en écrire de mauvais. A contrario, ce genre de livre raté raisonne comme une insulte à la jeune carrière littéraire de la Nothomb. Autant de jeunes auteurs ou de brillants romans évincés des lumières de la rentrée littéraire par l’ombre englobante d’une notoriété en bleu de travail et en manque d’inspiration, c’est franchement accablant.
La plupart des critiques encensent "le dernier Nothomb", décrivant son plat roman comme un chef-d'oeuvre d'incongruité. Des clous ! Des personnages d'une impalpabilité incroyable, dénués de toute personnalité, leurs réactions ne semblant dictées que par la volonté (ou l'absence d'inspiration) de l'auteur seule. L'intrigue capillotractée serait supposément propice aux thèmes de l'identité, du doute de soi, de l'unicité et du narcissisme. Thèmes à peine survolés tant l'auteur s'empresse de nous servir du Nothomb : nombreuses disgressions, souvenirs d'enfance et, bien sûr, références japonisées. Tomber dans la mascarade de la rentrée littéraire et dans la consommation compulsive de Nothomb a de quoi dégouter ses plus fervents lecteurs, dont je fais maheureusement partie.
Le Fait du prince d'Amélie Nothomb